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27 Jul 18 | News

Gestion du vieillissement du personnel en entreprise. Quelles pratiques managériales développer pour soutenir la compétitivité ?

C’est l’une des questions qu’aborde le projet de recherche « WorkAgeing » mené par le Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER) sous la direction du Dr. Thuc Uyen Nguyen-Thi, chercheuse au sein du département marché du travail.

Le Luxembourg a fait de l’emploi des seniors une priorité nationale. Malgré les récentes réformes du système de retraite et de retraite anticipée, le taux d’emploi des 55-64 ans au Luxembourg n´était que de 39,8% en 2017, alors que la moyenne de l’Union Européenne est de 57%.  

Le projet de recherche WorkAgeing[1] propose d´apporter des éléments supplémentaires à la compréhension de l´emploi des séniors en analysant les comportements des entreprises et des employés face au vieillissement actif. En effet, il est crucial de comprendre comment une profonde modification de la pyramide des âges des entreprises pourrait affecter la cohésion intergénérationnelle, le bien-être des employés, les opportunités d´emploi des séniors ainsi que la performance des entreprises. Cette question est d’autant plus importante que le vieillissement actif invite, notamment, à réfléchir à la meilleure façon de promouvoir la transmission intergénérationnelle des connaissances et des savoirs, un élément clef de la compétitivité de l’entreprise.

L’une des recherches de ce projet porte sur la gestion de la diversité des âges en entreprise et s’interroge sur les pratiques managériales à développer afin de soutenir les performances des entreprises qui font face au vieillissement de leur personnel. La diversité en termes d’âge est souvent étudiée sans tenir compte des différentes formes qu’elle peut prendre. Notre recherche considère deux formes différentes de diversité : la variété et la polarisation. La variété se réfère à la formation des groupes au sein desquels des employés de différentes générations travaillent. La polarisation se traduit en revanche par une décomposition du personnel en sous-groupes distincts de travailleurs de même génération. Les résultats de la recherche montrent que les entreprises dominées par la polarisation sont moins performantes que celles caractérisées par la variété. Celle-ci favorise les synergies entre générations et l’échange de connaissances et de valeurs propres à chaque génération. En revanche, la polarisation tend à générer des conflits intergénérationnels qui nuisent à la transmission des connaissances et des savoirs, à la cohésion, au bien-être et à la performance collective.

Dès lors, une question se pose : quelles sont les pratiques managériales qui permettraient aux entreprises d’atténuer les effets négatifs de la polarisation et d’exploiter les effets positifs de la variété ? Pour l’heure, il existe très peu de connaissances scientifiques sur cette question. Pour y répondre, cette recherche se concentre sur trois catégories de pratiques managériales ; la première rassemble les pratiques visant à favoriser l’implication des employés dans les décisions de l’entreprise, la deuxième catégorie regroupe les pratiques visant à développer les compétences des employés et la troisième catégorie regroupe les pratiques visant à accroitre la motivation des employés à l’aide d’incitations financières notamment.

Les résultats indiquent que les pratiques visant à favorise l’implication des employés sont les plus efficaces pour atténuer les effets négatifs de la polarisation. Les incitations financières n’ont en revanche aucun effet. Par ailleurs, en présence de variété d’âge, les pratiques visant à développer les compétences des salariés, si elles sont génériques et introduites sans considération des besoins spécifiques des employés de différents âges, sont néfastes pour la performance de l’entreprise.

C’est aux managers que revient le rôle stratégique de gérer la structure des âges au sein de l’entreprise. Ils devraient donc, autant que possible, favoriser la variété en mélangeant de façon homogène les employés de différents âges. Toutefois, si la polarisation des employés entre groupes d’âge différents ne peut être évitée, les pratiques managériales favorisant la collaboration, la cohésion et la transmission des savoirs entre générations devraient être mises en place pour soutenir la compétitivité des entreprises plutôt que des pratiques individuelles d’incitation financières. Enfin, les politiques de formation devraient être introduites de façon ciblée et adaptée à chaque catégorie d'âge.

Article rédigé par le LISER, paru dans Femmes Magazine, édition juillet 2018

[1]  Le projet de recherche WorkAgeing « Older workers’ employment participation: new evidence from  Luxembourg » est financé par le Fond National de la Recherche (FNR/C16/SC/11344520) et soutenu par le Ministère du Travail, de l'Emploi et de l'Économie sociale et solidaire du Luxembourg.