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26 Feb 18 | News

La digitalisation de l’environnement de travail a-t-elle une influence positive sur la motivation des salariés ?

Cet article utilise les résultats de deux articles de recherche réalisés dans le cadre du projet TWAIN[1] (Technology use at Work And INovative work practices) réalisé par Dr Ludivine MARTIN, chercheur au Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER) et financé par le Fonds National de la Recherche (FNR). Il s’intéresse en particulier à la motivation au travail par rapport à l’usage des technologies de l’information et de la communication (TIC) au sein des entreprises.

Des motivations au travail différentes ?

Le concept de motivation au travail retenu ici est fondé sur des travaux en psychologie du travail et se décompose, d'un côté, par une motivation liée à la réalisation de tâches en phase avec ses propres valeurs ou par plaisir (motivation dite autonome) et d'un autre côté par une motivation illustrant l'adhésion du salarié au système de récompense de l'entreprise et la volonté de stimuler son ego (motivation dite contrôlée).

La motivation autonome est associée à des comportements positifs des salariés avec plus de partage d'information, de coopération entre collègues, d'engagement affectif et de performance. Ce n'est pas le cas de la motivation contrôlée qui est uniquement associée à ce que l'on appelle un engagement de continuité vis-à-vis de l'entreprise qui conduit l'individu à rester dans son emploi pour éviter les coûts inhérents à un changement d'emploi.

Effet positif ou négatif des TIC sur la motivation au travail ?

Ainsi, parmi les technologies de l'information nous pouvons retenir que l'usage du Workflow (outils de gestion du flux de travail) augmente l'intérêt que le salarié porte à son travail, ainsi que son investissement au travail pour donner le meilleur de lui-même et ne pas échouer. Toutefois certaines technologies de la communication (web-conférences, groupware-logiciels de travail collaboratif) lorsqu’elles sont mal utilisées, peuvent, au-delà du bénéfice premier qu’elles apportent, avoir des effets négatifs sur l’autonomie des salariés dans le sens où les décisions sont alors plus souvent prises par les échelons hiérarchiques supérieurs. L'analyse montre également qu'un usage combiné des différentes technologies renforce positivement les différentes dimensions de la motivation à l'exception de la motivation extrinsèque[2], mais qu’il n’a pas que des avantages pour l’entreprise puisque cet usage combiné incite les employés à quitter leur emploi.

Qu’en est-il de l’usage de l’e-mail professionnel ?

Il a été observé qu’il augmente les différentes dimensions de la motivation, à l'exception de la motivation extrinsèque. Précisons toutefois que ce résultat ne tient pas compte de l'intensité de l'usage de l'e-mail. D'autres travaux scientifiques ont en effet montré que l'usage intensif de l'e-mail peut engendrer de l'anxiété liée à l'infobésité et/ou aux difficultés à se déconnecter.

Les résultats de cette recherche invitent les entreprises à prendre conscience des effets positifs et négatifs de la digitalisation de l’environnement de travail sur leur organisation, et sur les dimensions de la motivation de leurs employés. Les employeurs doivent notamment chercher à stimuler la motivation autonome de leurs employés (valeurs et plaisir) puisque cette stimulation influencera directement leur performance et participera in fine à la pérennité des entreprises et de l'emploi.


[1]  Des données collectées en 2013 auprès d'employeurs et de salariés du secteur privé luxembourgeois ont été utilisées. Ces données permettent d'identifier les technologies utilisées, les motivations et la volonté de rester dans l'emploi actuel de plus de 14.000 employés du secteur privé (résidents et frontaliers) travaillant dans plus de 2.000 entreprises d'au moins 15 salariés installées au Luxembourg.

[2] La motivation extrinsèque : partie de la motivation contrôlée où l’action du salarié est provoquée par une circonstance extérieure (e.g. récompense).

MARTIN Ludivine.
Economic and Industrial Democracy, 2018.