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16 Sep 19 | News

La négociation collective au Luxembourg entre stabilité et érosion

La déclaration d’obligation générale des conventions collectives est un mécanisme important au Luxembourg, dans des secteurs aussi divers que les banques, les assurances, la construction ou encore le gardiennage.

Adrien Thomas et Patrick Thill, chercheurs au Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER), ainsi que Vassil Kirov, chercheur à la Bulgarian Academy of Sciences, ont rédigé le chapitre 19 de l’ouvrage publié par l’European Trade Union Institute (ETUI) intitulé : Torsten Müller, Kurt Vandaele and Jeremy Waddington (eds.) Collective bargaining in Europe: towards an endgame. Brussels: European Trade Union Institute ETUI.
Intitulé «Luxembourg: an instance of eroding stability?», ledit chapitre est consacré à la situation de la négociation collective et au rôle des conventions collectives dans la régulation des conditions de travail au Luxembourg.

Si le système des relations professionnelles au Luxembourg se caractérise encore par une relative résilience en comparaison avec la situation dans d’autres pays européens, des éléments d’érosion sont cependant perceptibles, en particulier depuis la crise économique et financière internationale de 2008. Le taux de syndicalisation a en effet diminué de 42 % en 2002 à 34 % en 2014. Au cours de cette période, le nombre absolu de membres syndicaux a augmenté, mais les syndicats n’ont pas réussi à suivre l’augmentation rapide de l’emploi global générée par la forte croissance de l’économie luxembourgeoise.

Les syndicats sont encore bien implantés dans un certain nombre de secteurs (secteur public, industrie manufacturière), mais dans d’autres secteurs la présence syndicale et la couverture des négociations collectives sont faibles (commerce, restauration-hôtellerie, services aux entreprises). En même temps, les syndicats continuent d'exercer une influence politique importante par le biais des institutions tripartites et de leur participation à l'élaboration des politiques publiques.

La déclaration d’obligation générale des conventions collectives est un mécanisme important au Luxembourg, dans des secteurs aussi divers que les banques, les assurances, la construction ou encore le gardiennage. Le taux global de couverture des négociations collectives au Luxembourg se site à 59 % en 2012. Ce taux est comparable à celui de l'Allemagne, mais nettement inférieur à celui de la France, où il se situe à 85 % ou en Belgique, avec 96 %. Le taux de couverture diminue avec le niveau d'éducation des travailleurs. Ce taux est comparable à celui de l'Allemagne, mais nettement inférieur à celui de la France, où il se situe à 85 % ou en Belgique, avec 96 %.

Le taux de couverture diminue avec le niveau d'éducation des travailleurs. Les travailleurs ayant un faible niveau d'éducation (premier cycle de l'enseignement secondaire) sont couverts à un taux de 67 % par une convention collective et les travailleurs ayant un niveau d'enseignement intermédiaire (enseignement secondaire supérieur) sont couverts à 63 %. Le taux de couverture parmi les diplômés de l'enseignement supérieur n'est que de 46 %, selon les données du STATEC.

Le taux de couverture des conventions collectives varie également selon la taille de l'entreprise. Plus l'entreprise est grande, plus ses employés sont susceptibles d'être couverts par une convention collective.

Étant donné l'inégalité de la présence syndicale au niveau de l'entreprise, où de plus en plus de délégués du personnel ne sont pas membres d'un syndicat, la conclusion de nouvelles conventions collectives risque de poser des défis aux syndicats. Bien qu'il ne faille pas s'attendre à court terme à des changements profonds dans le domaine de la négociation collective au Luxembourg, la lente diminution de la présence syndicale et du taux de couverture des conventions collectives pourrait progressivement porter atteinte à la stabilité de la négociation collective. Parallèlement, les conventions collectives existantes risquent de perdre progressivement de leur substance lorsqu'elles sont renégociées, de sorte qu'elles contiennent de moins en moins d'avantages pour les employés. La négociation collective est également confrontée aux défis de la digitalisation, qui se traduit, par exemple, par une reconfiguration des carrières dans un certain nombre de secteurs.

Adrien Thomas, Vassil Kirov, Patrick Thill, «Luxembourg: an instance of eroding stability?», In Torsten Müller, Kurt Vandaele and Jeremy Waddington (eds.) Collective bargaining in Europe: towards an endgame. Brussels: European Trade Union Institute ETUI.